2010-12-28

 

L'iconographie de la science-fiction

La couverture du catalogue de l'exposition « Sciences & science-fiction » à la Cité des Sciences et de l'Industrie de La Villette à Paris reflète déjà une certaine idée de la science-fiction. Ou ne reflète pas, puisque la version numérisée de la couverture (ci-contre) ne révèle pas le choix d'une couverture argentée dans la ligne des anciens tomes de la collection « Ailleurs et Demain ». (En fait, l'apparence qui résulte de la numérisation est plutôt psychédélique — ce qui correspondrait, après tout, aux années de la première montée en puissance de la science-fiction en France.) L'exposition a eu pour commissaires Ugo Bellagamba (de l'Université de Nice), Patrick J. Gyger (alors à la tête de la Maison d'Ailleurs), Roland Lehoucq et Clément Pieyre (de la Bibliothèque nationale de France). Je n'ai malheureusement pas pu juger en personne du contenu de l'exposition et je suis donc incapable de dire si le catalogue est un reflet fidèle de cette exposition. Après tout, ma propre contribution au catalogue — un article intitulé « Le mur du futur » qui vulgarise le concept de la singularité vingienne — correspondait à une commande passée sans qu'on m'informe de ce que l'exposition avait à dire sur le sujet. En tout cas, le reste du sommaire porte plus sur la science vue par la science-fiction que sur la science-fiction telle qu'elle serait vue ou appréciée par les scientifiques.

En effet, ce sont surtout les thèmes classiques de la science-fiction qui structurent l'ouvrage : fin(s) du monde, extraterrestres, voyages dans le temps, voyages interstellaires, utopies, langues inventées, uchronies, villes du futur, robots et cyberespace. Quelques articles se démarquent par un ancrage plus scientifique, dont « Atteindrons-nous bientôt les étoiles ? » de Lehoucq et « Une machine emblématique : le laser » d'Éric Picholle, mais l'ensemble ne m'a pas semblé parvenir à approfondir le sujet des liens entre les sciences et la science-fiction. Le plus grand apport de ce catalogue se situe peut-être sur le plan visuel. Quiconque connaît un peu l'iconographie de la science-fiction mesurera les richesses qu'il était impossible de faire entrer dans un ouvrage d'à peine 200 pages. Néanmoins, l'échantillonnage qui s'étend sur plusieurs siècles est très impressionnant et permet d'apprécier le caractère révélateur de certaines images qui trahissent soit les priorités des lecteurs (les bustes féminins, dénudés ou non, dans le cas des anciens pulps) soit la vision du futur à telle ou telle époque. Même si les représentations des villes du futur sont assez extravagantes, il existe de nombreuses villes ou quartiers ou édifices qui ne sont pas loin d'avoir réalisé ces visions de la science-fiction... Un de ces jours, il faudra s'interroger sérieusement sur le fait que la science-fiction a peut-être le plus influencé les architectes du XXe s., et non les scientifiques, les inventeurs, les industriels, etc.

Bref, il s'agit d'un livre qui avance une thèse dès les premières pages — qu'il faut tenir compte de la science-fiction comme phénomène de la culture du XXe s. — mais qui n'arrive pas tout à fait à la justifier. Ou qui laisse à d'autres le soin de compléter la démonstration... On va s'y employer.

Libellés : , , ,


Comments: Publier un commentaire

<< Home

This page is powered by Blogger. Isn't yours?