2007-06-06

 

Le Québec des gros chars

Ce matin, l'émission de Christiane Charette nous rappelait que Jacques Godbout a peur pour l'avenir du Québec. Tout comme Lise Payette, il redoute que son Québec disparaisse. Il repousse cette disparition plus loin que l'autre, en fixant l'horizon de 2076. Et il a sans doute raison. Je dirais même plus qu'il est nécessaire que ce Québec disparaisse.

En effet, ce que trahit Godbout en déplorant la décroissance du Québec, c'est le rôle joué par le nombre et la taille dans la pensée nationaliste. De la revanche des berceaux à l'emblématique « On est six millions », un certain Québec a rêvé d'être fort par la masse. Tout devait être plus gros au Québec : le territoire (trois fois grand comme la France!), les barrages, les ponts, les voitures (la grosse Cadillac, symbole de succès), etc.

Ce que le discours des déclinologues comme Godbout ne manque jamais de faire, c'est de sauter rapidement de la décroissance de la population du Québec en chiffres absolus au déclin relatif à l'intérieur du Canada. Les deux ne sont pas équivalents, pourtant. La population du Québec pourrait continuer à augmenter lentement ou se stabiliser sans que cela empêche son déclin relatif. Ainsi, on peut soupçonner que c'est le chat qui sort du sac : ce qui inquiète, c'est la perte d'influence. On se demande même si ce n'est pas une admission tacite de l'influence dont le Québec a profité au sein de la fédération et des avantages qu'il a retirés du relais canadien...

J'ai toujours été frappé par le fait que les Québécois se trouvaient trop peu nombreux quand il y a plus de Québécois (et même de Québécois francophones) que de Danois, de Finlandais, d'Irlandais ou de Norvégiens, entre autres pays plutôt recommandables... Le Québec actuel est aussi populeux que la Catalogne et il n'y a aucun scénario démographique prévoyant que la population du Québec puisse être inférieure en 2051 à six millions de personnes et quelques.

Le Québec fait face à un défi, mais c'est le défi du passage de la quantité à la qualité. Même si le Québec avait un taux de croissance naturel plus proche de celui de la France ou des États-Unis, il connaîtrait un déclin relatif (tout comme le Canada) dans un monde constitué de pays en pleine expansion démographique et économique. Le réalisme impose donc de miser sur la qualité, et non sur la quantité. Ni le Québec ni le Canada n'auront jamais un marché intérieur comparable aux chasses gardées de l'Europe, des États-Unis ou même du Japon. Il faudra donc savoir exporter. Quand les matières premières s'épuiseront, il faudra exporter des idées. Et pour que celles-ci soient originales, il faudra que l'innovation s'appuie sur la meilleure formation possible.

Au lieu, par exemple, de viser un taux de réussite aussi élevé que possible aux examens de français, il s'agirait de s'assurer que cet examen ait un sens. Le taux de réussite à cette épreuve est d'ores et déjà aussi élevé, sinon plus, que celui du baccalauréat en France. En fait, la révélation du jour, en ce qui me concerne, c'est qu'il est actuellement possible pour un étudiant du collégial de commettre jusqu'à 30 fautes dans un texte de 900 mots et de réussir quand mème ce qui est pourtant une épreuve de français ! Il me semble pourtant que si on veut investir dans une économie du savoir, on devrait se demander si ce n'est pas trop d'indulgence...

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